Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Nath va au cinéma
14 juin 2021

Nomadland ★★★

cover-nomadland-nathvaaucinema_HD

Nomadland a sacré Chloé Zhao tout d'abord à Venise (le film a obtenu le Lion d'or) jusqu'aux Oscars, ainsi que Frances McDormand en tant que meilleure actrice. C'est bien grâce à cette dernière que cette production existe. Elle est tellement fascinée par le livre de la journaliste Jessica Bruder "Nomadland : Surviving America in the Twenty-First Century" publié en 2017, qu'elle en achète les droits. Son choix se tourne vers Chloé Zhao pour la réalisation, impressionnée par son deuxième film, The Rider, avec lequel elle se réapproprie les codes du western.

Ce choix est évident. Chloé Zhao sait si bien parler des minorités tout en créant une esthétique onirique grâce à sa manière d'utiliser la lumière naturelle et sa manière de filmer les paysages immenses, décors vivants. Elle sait surtout percevoir les qualités humaines et les mettre en avant. Son héroïne ici, Fern, une femme seule proche de la retraite, traverse l'ouest américain dans son van, à la recherche de petits jobs. Elle rencontre d'autres nomades comme elle, communauté trop souvent perçue comme marginale par la société, ou pire sans abris, alors que se sont souvent des seniors qui ont opté pour ce mode de vie afin de survivre en suivant leurs idéaux de liberté, partage et fraternité. Une réplique entre Fern et la fille d'une de ses amies en est l'illustration parfaite. La jeune fille lui demande si elle est sans abris. Fern lui répond avec bienveillance de faire la nuance entre être sans maison et être sans abri, car elle a bien un abri : son van aménagé.

5664166

Nomadland est une ode à la liberté tout en mettant en avant la précarité créée par un monde capitaliste vacillant. Alors qu'un homme, croisé chez sa sœur, se targue de vendre des maisons à crédit, Fern le questionne sur le fait d'endetter des gens à vie, voire pire, pour l'achat d'une maison au-dessus de leurs moyens. Le film fait d'ailleurs la différence entre ces nomades qui ont choisi de s'établir dans une maison mobile et un vagabond. Évidemment leur condition est fragile, mais ils trouvent une certaine stabilité dans leur mobilité et leurs jobs saisonniers. Au fil des rencontres, on découvre leurs rêves et leurs idéaux, mais aussi un peu de leur passé, ce qui les a amené à ce choix de vie.

Le film se déroule sur un cycle d'un peu plus d'une année. Fern a tout perdu, son mari, sa maison, même la ville dans laquelle ils résidaient n'existe plus (cette histoire vraie est invraisemblable d'ailleurs). On pense d'abord qu'elle survit avant de comprendre qu'il lui est impensable de s'établir quelque part de manière fixe grâce à ses échanges avec son amie Linda May comme au fur et à mesure de ses rencontres. Lorsqu'elle décide de se rendre à un rassemblement de nomades en plein désert, son état d'esprit devient limpide, comme celui de tous ces nomades. Cette communauté vit dans un partage et une générosité incroyable. Leur gentillesse fait du bien à voir.

0001198

Frances McDormand porte le film sur ses solides épaules. Quel bonheur de voir une femme qui assume son corps et son âge (c'est tellement rare une actrice américaine sans chirurgie), qui se dévoile de manière si naturelle en montrant ses peines et ses faiblesses sans honte. À ses côtés, ce sont de vrais nomades. Comme dans The Rider, Chloé Zhao a fait jouer leurs propres rôles à de vrais nomades. Ils sont tous d'un naturel et d'une profondeur déconcertante. Tout semble facile et encore une fois, la gentillesse et la générosité font partie de leurs mots d'ordre. Ce road trip fait réfléchir aux futilités de la vie, à ce qui est important, à ce qui compte vraiment. Nomadland fait revenir à l'essentiel. On retrouve les sensations du chaud et du froid et on prend conscience des quatre éléments : l'eau d'une averse, la terre du désert, l'air des grandes plaines et le feu qui permet de se réunir le soir pour se réchauffer dans une ambiance bon enfant et festive.

L'habillage musical est à l'image du film, d'une simplicité tout aussi apparente, un piano doux et mélancolique, sans fioriture. On va aussi à l'essentiel au niveau du son. La beauté des images, dont la photographie est gérée avec beaucoup de subtilité par Joshua James Richards sur tous les films de la réalisatrice, et l'intensité du jeu de Frances McDormand suffit pour ressentir les émotions. Il en ressort une grande finesse dans la perception des choses.

Rien n'est futile dans le cinéma de Chloé Zhao. En récompensant son film, les membres de l'Académie des Oscars reviennent à l'essentiel, à un cinéma qui fait la part belle au social et aux minorités, sans fioriture et ancré dans le réel, avec une sensibilité poétique sans être fataliste. Curieusement, la réalisatrice a été choisie pour réaliser The Eternals, prochaine sortie Marvel prévue pour novembre prochain. On peut se demander si elle aura pu garder cette sensation de liberté et la profondeur qui habite ses précédents films ? En tout cas, Nomadland fait preuve d'une merveilleuse authenticité, de modestie, via le portrait de cette femme si forte, si libre.


Nomadland, sorti au cinéma le 9 juin 2021 - 1h48

Publicité
Publicité
Commentaires
Nath va au cinéma
  • Nath vous parle des films qu'elle a vus. ★★★★ : Méga super bien — ★★★ : Très bien — ★★ : Pas trop mal — ★ : Bof — ☄ (comète) : Ce film est un ovni, je ne sais pas si j'adore ou pas mais ça ne m'a pas laissé indifférente
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Publicité